Alain Sanders nous a transcrit un dialogue entre Nasser et le chef des Frères musulmans de l'époque. Ou plutôt les mots de Nasser dans lesquels il raconte ce dialogue. Donc, dans les citations qui suivent, "moi"=Nasser, "lui"=chef des Frères musulmans.
Moi, à mon avis, chacun est libre de ses choix. Il m' a dit: non, c'est à toi de décider en tant que gouverneur responsable.
La loi qui pénalise le port du plein voile en France est donc dans l'esprit des Frères musulmans, avec une application inverse. Ajoutons, moins lourde, car c'est une chose d'interdire qqc de spécifique en permettant les alternatives et une autre chose d'interdire tout un spectrum en permettant unequement une chose spécifique. Et ne pas demander une amende de chaque femme qui porte volontairement la burqah est ce qui aurait été le choix de Nasser.
Les gouverneurs ne sont pas responsable pour tout ce que se fait parmi les sujets.
Je lui répondis Monsieur, vous avez une fille à la faculté de médicine et elle ne porte pas le voile. Pourquoi ne l'obligez-vous pas à le porter? Si vous n'arrivez pas à faire porter le voile à une seule fille, et qui, en plus, est la vôtre, comment voulez-vous que j'oblige dix millions d'Égyptiennes à le porter?
À l'époque, Nasser disait ça, de Gaulle disait "comment voulez-vous gouverner un pays qui a 600 fromages"? Les gens qui gouvernaient avaient conscience des limites du pouvoir.
Et, c'est ça qui narguait les Frères, sans doute. Leur conseiller général aurait pu dire que les lois de Nasser l'empêchait d'obliger sa fille de porter le voile (ce qui est bien en soi) et que c'est ça qu'il reclamait que Nasser "rectifie" avec une législation inverse. Cet état de loi, que moi et Alain Sanders trouvent les deux un bien pour l'Égypte de l'époque, est le même que la France avait avant une récente législation.
Un père Musulman en France d'avant-hier aurait pu se horrifier de l'une fille qui optait pour l'intégrisme autant que pour l'autre qui optait pour le punk (s'il y en avait de ces gens qui optaient pour le punk). Mais il ne pouvait pas bien trop faire pour empêcher leurs choix. Aujourd'hui il peut dire à l'une:
Non, tu dois montrer ta figure sur la voie publique, c'est la loi!
Et à l'autre:
Non, ta sœur ne peut pas porter le voile et tu veux que je te laisse t'habiller comme une ...? Ce n'est pas juste envers elle!
Et les deux filles ont perdu leur liberté. Et l'état ou plutôt ses administrateurs ont gagné une excuse pour mettre des gens au mal. Et les villes où la nouvelle loi ne s'applique pas, ceux qui refusent là de faire l'impossible, ont gagné une excuse pour donner l'impression de rendre des faveurs qui reclament la gratitude juste en faisant ce qui est normal. Chaque réglimentation en soi largément inapplicable donne des occasion d'humiliation, de "générosité", de réclamations de gratitude aux "endettés de gratitude" par cette générosité.
Car c'est normal qu'à part les excès importantes (je pense au nudisme montré récemment par les Femen), la loi ne se mêle pas dans les choix vestimentaires.
Mais si elle s'y mêle, plutôt comme au Moyen Age: en réservant certaines costumes à certaines personnes, en interdisant l'hermelin aux bourgeois, en obligeant ceux qui ont une autre religion que le Catholicisme majoritaire de s'identifier. Sauf que, le Catholicisme n'est plus exactement majoritaire. Mais si on ne peut pas obliger les Juifs ou les Musulman à se distinguer par vêtements au moins ne pas l'interdire - par inversion des valeurs d'honnêteté en matière religieuse - à ceux et à celles qui le font quand même.
Là, on pourrait au moins dire qu'il ne s'agit plus "de minimis". Ceux qui le prétendent pour les femmes choisissant le voile, à cause de la dignité bafouée par une obligation (ce qui ne relève donc pas de leur cas), leur donnent le choix: "soit tu te laisses avoir par ton mari ou père, soit tu te laisses avoir par nous et nous préférons que c'est par nous."
Moi, je ne le préfère pas.
Comme je ne suis pas non plus contre l'autre partie de la même législation récente, celle qui punit un mari ou père ou frère obligeant sa femme ou fille ou sœur de porter le voile. Car la force inique est une chose de quoi la loi peut avoir quelque chose à dire.
Hans-Georg Lundahl
Bpi, Georges Pompidou
Ste Cécile
22-XI-2012
PS: j'aurais presque voulu transformer le tître en "de minimis non curat recta lex", mais ça, c'est se répéter. Une loi qui n'est pas droite n'est pas une loi. Oh - encore une chose: depuis 1993 il n'y a plus une loi générale contre mendicité sur voie publique. Il semble que certains vétérans des services policières ou de sécurité n'ont pas été au courant ou qu'ils ont même essayé d'oublier et de faire oublier ce changement salutaire. La mendicité agressive est un délit, par contre, depuis la même date. Puisque les condamnations pour ce délit manquent, il semble que mendicité ne constituait pas un problème de sécurité habituellement avant non plus.
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